De Jonathan Parent

Actualités — Hausse sans précédent du prix du grain vert

Publié en novembre dernier, le rapport de l’International Coffee Organization indiquait que le prix du grain vert d’Arabica venait de grimper de 77,9 %, après quatre années consécutives de prix considérablement bas. Qu’est-ce qui peut expliquer un bond si important? Pandémie, phénomènes climatiques et chaîne logistique défaillante sont au centre des discussions.

Même si l’achat du café de spécialité se fait indépendamment du cours boursier, il n’en reste pas moins que les phénomènes expliquant cette hausse ont touché l’ensemble de l’industrie du café. Alors que le prix du grain vert à la livre se situait à 1,09 dollar US en novembre 2020, il vient d’atteindre, un an plus tard, 1,95 dollar US. En décembre, il tournait autour de 2,40 dollars US. Il s’agit d’un changement draconien dans le marché, causé par deux principales situations.

1. Les perturbations du transport maritime s’expliquent par une augmentation de la demande de biens de consommation suivant la pandémie et par un nombre insuffisant de cargos pour répondre au besoin.

On remarque que la pénurie de conteneurs dans lesquels sont exportés les grains verts pourrait jouer un rôle d’importance dans la hausse du prix. Un peu partout dans le monde, les ports sont saturés. Les compagnies d’exportation souhaitent éviter d’amplifier la problématique. Comme moyen de dissuasion, elles vont facturer plus. Les coûts d’expédition peuvent être jusqu’à trois fois plus élevés qu’avant la pandémie.

Des enjeux sociopolitiques font également partie des raisons pour lesquelles les exportations des pays producteurs ont subi quelques revers. À titre d’exemple, plus tôt cette année, en Colombie, d’importants barrages routiers et des fermetures de ports ont été mis en place en guise de protestation contre les réformes fiscales du gouvernement. En plein milieu de la saison des récoltes, il était donc difficile, voire impossible, d’exporter du café. Cela a exacerbé les problèmes causés par la Covid-19

2. Étant le pays producteur le plus important d’Arabica, le Brésil a perdu une part substantielle de ses récoltes en raison de la sécheresse et du gel, ce qui se traduit par une baisse considérable dans l’offre mondiale en café.

En juillet 2021, les températures au Brésil sont descendues sous 0°C dans certaines régions notoires où l’on cultive les caféiers dont Minas Gerais et Sao Paulo. Il s’agit du pire gel depuis 1994, selon les agriculteurs et les analystes. Ce phénomène météorologique, qu’on appelle le « Black Frost », n’est pourtant pas un gel à proprement parler. C’est une condition observée dans les plantations lorsque l’humidité est trop faible pour que le givre se forme, mais que la température tombe si bas que les tissus végétaux meurent. Pour les jeunes plants, c’est fatal. Les arbres matures les plus endommagés auront, quant à eux, besoin d’une taille importante et ne produiront de nouveau qu’après deux ans. On pense que cette période de gel pourrait diminuer la production de l’année 2022-2023 de 50 %.

En plus, quelques mois plus tôt, le Brésil faisait face à sa pire période de sécheresse depuis 91 ans. Les agences gouvernementales avaient alors sonné l’alarme, suscitant des craintes de rationnement énergétique. Le manque de pluie en plus d’augmenter les risques d’incendie en Amazonie, affectait la production d’énergie hydroélectrique et, évidemment, l’agriculture.

On peine encore à évaluer les dégâts de ces deux événements climatiques. On présume toutefois que, dans certaines régions où plusieurs arbres n’ont pas survécu, il pourrait falloir jusqu’à sept ans avant que les plantations retrouvent leur rendement antérieur.

Avec l’exportation difficile des grains verts, mais aussi de plusieurs autres denrées, vers l’Amérique du Nord et l’Europe, et les dommages causés aux plantations du Brésil, il faut s’attendre à une augmentation des prix des sacs de café. Cette hausse permettra aux torréfacteurs d’ici et d’ailleurs d’absorber les coûts supplémentaires et les aidera à continuer d’acheter des cafés de qualité aux fermiers.

Recherche et rédaction par Chloé Pouliot

Photo : Cantook - Projet La Karola 

Sources:
Analysis: Retail Coffee Prices to Climb As Frost And Freight Costs Bite, Reuters.

Coffee Market Report - Coffee Price Rise Continues in November reaching a 10-year high, International Coffee Organization.

Faces Worst Dry Spell in 91 Years, Reuters.

Frosts Stain Brazil Coffee Belt, Growers See Nearly a Third of Fields Hit, Reuters.

Un prix plus corsé pour sa tasse de café, La Presse.